Après la crise: peut-on éviter le syndrome de la victime?

Après la crise: peut-on éviter le syndrome de la victime?

P. Luc Dupont, Président de la Société de recherche en orientation humaine et spécialiste en stratégies internationales

Extrait de la conférence du 20 mai 2009

La conférence et les débats entourant ce thème ont mis en évidence une dimension essentielle de l’état de victime : la perte de l’espoir dans l’avenir. Cette perte se reflète dans la diminution de la capacité d’action de la personne, amenuisant ainsi les moyens à sa disposition pour se prendre en main, pour faire face à l’adversité rendant ainsi plus aléatoire la réalisation de ses ambitions. La prévention, l’éducation et l’action sociale sont les véritables remparts pouvant aider à contenir l’émergence de telles situations.

 La notion de victime est de nos jours utilisée pour justifier toutes les fins : idéologique pour assurer une légitimité et l’adhésion à une cause; politique pour justifier une réaction ou établir un rapport de force; et même commerciale (polices d’assurances diverses) pour générer des revenus. Paradoxalement, le sentiment de victime permet à la personne de se délester de sa part de responsabilité dans ce qu’elle vit ou croit subir. Il est vrai cependant que nous évoluons dans un contexte de complexité croissante, que l’on pense à l’interdépendance des phénomènes mondiaux tels que : les systèmes financiers; le climat; la pollution; la santé (H1N1); l’énergie et son corollaire le multilatéralisme.

Face à cette complexité, le citoyen sent qu’il perd son emprise et sa capacité d’influence devant des enjeux qui lui apparaissent plus théoriques, plus éloignés de son quotidien. Parallèlement, la capacité d’action des élus, porte sur des enjeux de plus en plus locaux et l’intérêt de la population se tourne vers des sujets qu’elle arrive à comprendre (sport, drames, feuilletons). Si la population se détourne, en raison de cette complexité, de ses prérogatives de citoyen, cela se traduira inévitablement par une absence de vigilance; une désaffection aux urnes (une constante au cours des dernières années); l’érosion du processus démocratique et l’émergence de dérives potentielles pouvant créer de nouvelles victimes. Pour prévenir, il faut recouvrer les notions de respect et de responsabilité; l’engagement dans les affaires de la cité; et la construction de passerelles de collaboration pour veiller à nos intérêts comme collectivité et comme citoyen.

Le changement est devenu une constante dans notre société contemporaine et l’adaptation un élément de compétitivité voire de survie. Comme le soulignait Mickey Kantor, ancien secrétaire au Commerce américain sous Clinton, « Ce ne sont pas les gros qui vont manger les petits mais les rapides qui vont dépasser les lents » Dans cet optique, l’apprentissage est un processus continu et l’action un élément intégrateur de l’information et déclencheur de la prise de conscience nous permettant de développer de nouvelles compétences. Cependant, devant ce tourbillon incessant de changements, l’humain a besoin de repères et de constance qui ne peuvent changer, c'est-à-dire l’appartenance dans laquelle il peut puiser sa force, son courage et sa détermination.